Qu'est-ce qu'un accélérateur ?
Un accélérateur propulse des particules chargées, comme des protons ou des électrons, à des vitesses très élevées, proches de celle de la lumière. Elles sont ensuite projetées sur une cible ou contre d’autres particules, circulant en sens inverse. ces collisions permettent aux physiciennes et physiciens de sonder l’infiniment petit.
Lorsque les particules sont suffisamment énergétiques, il se produit un phénomène qui défie le sens commun : l’énergie de la collision se transforme en matière. Elle se matérialise sous forme de particules, dont les plus massives existaient dans l’Univers primordial. Ce phénomène, qui ne prévaut que dans l’infiniment petit, est décrit par la célèbre équation d’Einstein E=mc2 : la matière est une forme concentrée d’énergie et les deux sont interchangeables.
Le Grand collisionneur de hadrons LHC, l’accélérateur le plus puissant au monde, propulse ainsi des particules communes, comme des protons qui forment la matière que nous connaissons. Accélérés à une vitesse proche de la lumière, ils percutent d’autres protons. Ces collisions génèrent des particules massives, comme le boson de Higgs ou le quark top. La mesure de leurs propriétés permet de comprendre la matière et les origines de l’Univers. Ces particules massives n’existent qu’un instant fugace et ne sont pas observées directement. Elles se transforment (ou se désintègent) instantanément en particules plus légères, qui se désintègrent à leur tour. Les particules issues des désintégrations successives sont identifiées dans les couches du détecteur.
Comment fonctionne un accélérateur ?
Les accélérateurs utilisent des champs électromagnétiques pour accélérer et guider les particules. Des cavités radiofréquence propulse les faisceaux de particules, tandis que des aimants concentre les faisceaux et incurvent leur trajectoire.
Dans les accélérateurs circulaires, les particules reçoivent une impulsion électrique à chaque tour : au bout d’un certain nombre de tours elles acquièrent l’énergie désirée. En théorie, on pourrait augmenter encore et toujours l'énergie, mais maintenir les particules sur une trajectoire circulaire nécessite des aimants d’autant plus puissants que leur énergie est grande. Un accélérateur linéaire, au contraire, est exclusivement formé de structures accélératrices puisque les particules n’ont pas besoin d’être déviées, mais ne bénéficient que d’une seule passe d’accélération. Dans ce cas, augmenter l’énergie signifie allonger l’accélérateur. Les collisionneurs sont des accélérateurs qui provoquent des collisions frontales entre les particules. Cette technique permet d’augmenter l’énergie de collision puisque l’énergie des deux particules s’additionne.
À mesure que les physiciens exploraient de nouvelles énergies, les accélérateurs devenaient de plus en plus grands : la taille d’un accélérateur est un compromis entre l’énergie, le rayon de courbure (s'il est circulaire), la faisabilité et le coût.
Le Grand collisionneur de hadrons est le plus grand et le plus puissant collisionneur du monde. Il propulse les particules dans une boucle de 27 kilomètres de circonférence à une énergie de 6,5 TeV (téraélectronvolts), provoquant des collisions à une énergie de 13 TeV.
Quelles sont les caractéristiques d’un accélérateur ?
Le type de particules, l’énergie des collisions, la luminosité sont parmi les caractéristiques importante d’un accélérateur.
Un accélérateur peut faire circuler une kyrielle de particules différentes, à condition qu’elles aient une charge électrique d'être accélérées par un champ électromagnétique. Le complexe d’accélérateurs du CERN propulse des protons, mais également des noyaux d’atomes ionisés (ions), comme des noyaux d'atomes de plomb, d'argon ou de xénon. Certaines exploitations du LHC sont ainsi consacrées à des collisions d’ions de plomb. L’installation ISOLDE accélère des faisceaux de noyaux exotiques pour des études de physique nucléaire.
L’énergie d’un accélérateur se calcule en électronvolts. Un électronvolt est l’énergie gagnée par un électron accéléré sous une tension électrique de 1 volt. Au terme de leur course dans le Grand collisionneur de hadrons, les protons acquièrent une énergie de 6,5 millions de millions d’électronvolts (6,5 teraélectronvolts ou TeV). C’est la plus haute énergie atteinte par un accélérateur, mais à notre échelle, c'est minuscule : cela correspond à l'énergie d’une aiguille tombant de 2 centimètres de haut ! Mais un accélérateur concentre cette énergie à l’infime échelle des particules, dans un espace dix mille milliards de fois plus petit qu’une épingle, permettant d’obtenir des densités d’énergie très élevées. C’est le secret des accélérateurs de particules, concentrer une petite énergie dans un espace infiniment petit pour obtenir des concentrations d’énergie très élevées, proches de celles qui existaient juste après le Big Bang.
La luminosité est une caractéristique importante mesurant l'efficacité d'un accélérateur : elle indique le nombre de collisions susceptibles de se produire par unité de surface et de temps. La luminosité instantanée s’exprime en cm-2s-1. La luminosité intégrée correspond au nombre de collisions susceptibles de se produire sur une période donnée et se mesure en inverse femtobarn. Un inverse femtobarn correspondant à 100 millions de millions de collisions potentielles.
Quels sont les accélérateurs du CERN ?
Le CERN exploite un complexe de huit accélérateurs et deux décélérateurs. Ces accélérateurs alimentent des expériences ou bien sont utilisés comme injecteurs, accélérant des particules pour des accélérateurs plus grands. Certains, comme le Synchrotron à protons (PS) ou le Supersynchrotron à protons (SPS) font les deux à la fois, préparant des particules pour des expériences qu’ils alimentent directement et en injectant dans des accélérateurs plus grands.
Le Grand collisionneur de hadrons LHC est ainsi alimenté en protons par une chaine de quatre accélérateurs qui propulsent les particules et les divisent en paquets.
Les accélérateurs sont pilotés depuis le Centre de contrôle du CERN où les opératrices et opérateurs se relaient jours et nuit en période d’exploitation.
Les accélérateurs actuels
Les accélérateurs du futur
Imaginer, développer et construire un accélérateur prend plusieurs dizaines d’années. Ainsi, l’ancien accélérateur Grand collisionneur électron-positon LEP n’était-il même pas mis en service que les scientifiques du CERN imaginaient déjà mettre en service un accélérateur plus puissant dans son tunel. C’était en 1984, vingt-quatre ans avant que le LHC ne démarre. Depuis 2010, les scientifiques planchent sur le successeur du LHC, le LHC à haute luminosité. Approuvé par le Conseil du CERN en 2016, ce LHC amélioré devrait démarrer en 2026. Les scientifiques du CERN travaillent également sur des accélérateurs au-delà de 2040, comme le Futur collisionneur circulaire ou le Collisionneur linéaire compact (CLIC). Des travaux sont également menés sur des technique alternatives d’accélération dans le cadre de l’expérience AWAKE.
Les accélérateurs du passé
De nombreux accélérateurs développés il y a plusieurs dizaines d'années sont toujours en fonctionnement. Le plus vieux d'entre eux est le Synchrotron à protons (PS), mis en service en 1959. Mais certains ont été arrêtés, leurs composants étant pour certains réutilisés pour de nouvelles machines, au CERN ou ailleurs. Retour dans le passé des accélérateurs du CERN.