Les accélérateurs du CERN alimentent une flopée d’expériences en jonglant avec différentes sortes de particules. Depuis le 12 février, le complexe d’accélérateurs réalise un numéro inédit, délivrant pour la première fois des ions d’argon à un programme expérimental. Les ions d’argon sont produits dans une source spéciale et circulent dans quatre accélérateurs avant d’être envoyés sur une cible.
Le faisceau d’ions d’argon est en préparation depuis deux ans dans la chaîne des accélérateurs du CERN. Le pilotage de ces particules, bien plus massives que les protons et envoyées à six énergies différentes, n’est pas tâche facile. Les opérateurs des machines ont dû adapter le système d’accélération du Super synchrotron à protons (SPS), dernier accélérateur emprunté par les ions avant d’être éjectés et qui représente une boucle de 7 kilomètres de circonférence.
En période d’exploitation du Grand collisionneur de hadrons LHC, le SPS est la dernière boucle d’accélération avant le grand collisionneur de 27 kilomètres de circonférence. Pour réaliser les huit semaines de physique avec les ions d’argon tout en alimentant les expériences du LHC, les accélérateurs fourniront les deux types de particules en alternance. Dans chaque "super-cycle" de 34,8 secondes, le SPS délivrera des faisceaux de protons et d’ions d’argon.
Les ions d’argon sont destinés à l’expérience NA61/SHINE qui étudie le phénomène de plasma de quarks et de gluons, état qui aurait existé au tout début de l’Univers et dans lequel les quarks évoluaient librement, sans être confinés par la force forte dans les protons et les neutrons. L’expérience étudie plus particulièrement les transitions entre la phase où les quarks sont confinés et la phase où ils sont libres. Le 12 février, NA61/SHINE a enregistré les premières collisions avec de l'argon : les ions d'argon, d'une impulsion de 150 GeV/c par nucléon, sont entrés en collision avec des noyaux de scandium.
Les accélérateurs du CERN accélèrent la plupart du temps des protons, mais jonglent épisodiquement avec d’autres particules. Outre les ions de plomb et maintenant d’argon, le complexe a fait circuler dans le passé des électrons, des positons, des antiprotons, des deutons, des particules alpha ainsi que des ions d’oxygène, de soufre, et d’indium. Ces particules sont soit percutées entre elles, soit envoyées sur des cibles pour créer des faisceaux de particules secondaires, comme des neutrinos par exemple. Le complexe d’accélérateurs alimente ainsi une vingtaine d’expériences étudiant un grand nombre de phénomènes de physique, comme l’antimatière, les neutrinos, les rayons cosmiques, l’interaction forte ou encore le boson de Higgs. Certaines sont en quête de signes d’une physique au-delà des théories actuelles ou de particules inconnues pouvant contribuer à la matière noire. Parmi ces expériences, on compte les quatre grandes expériences du LHC, ALICE, ATLAS, CMS et LHCb, les plus connues, qui reprendront du service au cours du printemps prochain. De surcroît, quelques dizaines d’expériences sont menées chaque année dans les installations de physique nucléaire ISOLDE et n_TOF.
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