Pour exploiter pleinement le potentiel du Grand collisionneur de hadrons (LHC), les opérateurs doivent procéder étape par étape, comme pour tout accélérateur de particules conçu pour explorer une nouvelle gamme d’énergies. Après le début, en juin, de la deuxième période d’exploitation à une énergie de collision record, à la mi-août, le LHC avait produit quelque 28 000 milliards de collisions pour les grandes expériences. Une cadence sur le point de s’accélérer, à mesure que les opérateurs vont augmenter progressivement l'intensité des faisceaux de protons dans la machine.
Le LHC a été conçu pour permettre aux protons de circuler à une vitesse proche de celle de la lumière, non pas en flux continu mais sous forme de paquets, contenant chacun environ 100 milliards de protons et espacés de 25 nanosecondes (ns). Dans ces conditions, une fois le LHC rempli, quelque 2 800 paquets de protons peuvent circuler dans les 27 kilomètres de l’accélérateur, plus de 11 000 fois par seconde.
Au cours de la première période d’exploitation du LHC, des protons sont entrés en collision à une énergie atteignant jusqu'à 8 teraélectronvolts (TeV) dans des paquets espacés de 50 ns. Désormais, l'énergie de collision est de 13 TeV et l’espacement entre les paquets est descendu à 25 ns.
Dans cette nouvelle phase, les opérateurs du LHC soumettent l’accélérateur à des tests rigoureux, avec des faisceaux stables à 25 ns, en augmentant lentement l'intensité. Cette phase fait suite à une période de « nettoyage » à 25 ns, qui a eu lieu vers la fin du mois de juillet pour libérer des molécules de gaz piégées à la surface des tubes de faisceau. Ces molécules peuvent générer des « nuages d'électrons », susceptibles de déstabiliser le faisceau de protons.
« Les tests ont révélé plusieurs questions cruciales, explique Mike Lamont, membre de l'équipe chargée des opérations du LHC. Ainsi, à 25 nanosecondes, le nuage d’électrons constitue un sérieux problème. »
L’équipe augmente actuellement le nombre de paquets de protons dans la machine, étape par étape. À chaque étape, la machine doit fonctionner pendant 20 heures au total, produisant des faisceaux stables pour les expériences ; dans le même temps, les opérateurs vérifient que tous les systèmes fonctionnent correctement, avant d'augmenter de nouveau le nombre de paquets. L’objectif à atteindre cette année est d’environ 2 300 paquets dans la machine, espacés de 25 ns.
Avec un tel accroissement de l'intensité du faisceau, le matériel de l’accélérateur est soumis à des contraintes bien plus fortes que pendant la première période d’exploitation du LHC. L’augmentation de l’intensité a révélé l’existence d’une défaillance mineure dans le système de protection contre les transitions résistives, qui sera réparée au cours du prochain arrêt technique, en septembre. Toutefois, les aimants supraconducteurs se comportent bien, et, depuis la première période d’exploitation, les opérateurs ont amélioré les systèmes d'injection, de montée en intensité et de focalisation.
« Nous n’en sommes encore qu’au début, ajoute Mike Lamont. Nous savions qu’exploiter l’accélérateur à 13 TeV serait un défi. Mais 2015 est vraiment une année de remise en service. Même si l’année sera courte pour la physique des protons, nous jetons déjà les bases pour 2016 et pour le reste de la deuxième période d’exploitation. »