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Dernières nouvelles du LHC : des angles pour les collisions

Pourquoi il doit y avoir un angle de croisement dans les collisions du LHC, et comment optimiser cet angle pour maximiser la performance

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Depuis le dernier arrêt technique hivernal, l’angle auquel les faisceaux entrent en collision au cœur d’ATLAS et de CMS est régulièrement réduit au cours des remplissages de la machine et pendant que les faisceaux produisent des collisions. Réduire l’angle de croisement pendant un remplissage permet de récupérer une partie de la luminosité potentielle totale qui est perdue en raison du fait que les collisions entre les faisceaux n’ont pas lieu de front mais suivant un angle de croisement de quelques centaines de microradians. Le principe de ce processus de réduction progressive de l’angle a été démontré en septembre de l’année passée, pendant une période de développement de la machine. Il a ensuite été automatisé pendant l’arrêt hivernal de 2016, pour pouvoir être utilisé régulièrement pendant l’exploitation du LHC. Après une validation réussie pendant la période de remise en service de 2017, il a été utilisé pendant tous les remplissages du LHC pour la physique qui ont eu lieu depuis lors.

Pourquoi doit-il y avoir un angle de croisement lorsque les deux faisceaux entrent en collision, et pourquoi souhaitons-nous le réduire ? Lorsque deux faisceaux du LHC s’approchent l’un de l’autre, à proximité des quatre régions d’interaction du LHC, il faut éviter qu’ils entrent en contact dans la zone où ils partagent le même tube à vide. La solution consiste donc à faire entrer en collision les faisceaux à un angle de quelques centaines de microradians. Mais même avec cet angle de croisement, les faisceaux interagissent à distance, par le biais de champs électromagnétiques. L’angle doit par conséquent être suffisamment grand pour que la séparation induite réduise à un niveau acceptable ces interactions à longue portée entre les faisceaux. Un grand angle de croisement fait toutefois diminuer la luminosité car il réduit la zone où les paquets se superposent. Le facteur de cette réduction géométrique dépend de l’angle de croisement, mais aussi de la dimension transverse du faisceau et de la longueur des paquets. Avec les paramètres de faisceau actuels du LHC, la perte liée à l’angle de croisement représente pour ATLAS et CMS environ 35 % de la luminosité de crête théorique.

Les scientifiques du LHC ont trouvé un moyen d’atténuer cet effet : étant donné que les faisceaux perdent de l’intensité au fil des collisions, ce qui, à long terme, fait décroître le taux de collisions, la réduction de l’angle de croisement apparaît comme une solution possible. Ces derniers mois, pendant l’exploitation pour la physique du LHC avec des protons, les angles de croisement des faisceaux ont été régulièrement réduits pendant la phase où les faisceaux entrent en collision. À l’heure actuelle, le demi-angle de croisement au cœur d’ATLAS et de CMS est de 150 microradians au début des collisions, et il est réduit de 10 microradians toutes les quelques heures, jusqu’à un minimum de 120 microradians. Cela entraîne une augmentation de la luminosité intégrée totale, pour chaque remplissage du LHC, allant jusqu’à 5 %.

Diminuer l’angle de croisement dans le LHC, alors que des faisceaux de haute intensité entrent en collision et que toutes les expériences enregistrent des données, n’est cependant pas une mince affaire. La protection de la machine et des expériences doit être assurée en permanence, et de nombreux systèmes des accélérateurs, y compris les aimants de guidage, le système de l’asservissement de l’orbite et les collimateurs situés autour des points d’interaction concernés, doivent être coordonnés afin de garantir une transition en douceur.

Le LHC vient de faire l’objet d’un arrêt technique de trois jours. Chaque arrêt technique est suivi d’une courte revalidation de l’exploitation de la machine, qui comprend une montée en intensité, réalisée en général sur trois ou quatre remplissages de la machine. Cette fois, l’équipe du LHC profite de la montée en intensité pour comprimer davantage le faisceau aux points d’interaction d’ATLAS et de CMS, en réduisant le paramètre β* de 40 à 30 centimètres. Ce changement devrait se traduire par une hausse de 10 % de la luminosité intégrée pour la suite de l’exploitation de 2017. 

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Le tunnel du SPS pendant un court arrêt technique en septembre 2017 (Image : M.Brice/CERN)
Réduire l’angle de croisement pendant un remplissage permet de récupérer une partie de la luminosité potentielle totale qui est perdue en raison du fait que les collisions entre les faisceaux n’ont pas lieu de front mais suivant un angle de croisement de quelques centaines de microradians.