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Un cristal pour extraire les faisceaux ?

Une nouvelle technique d’extraction lente, basée sur l’utilisation d’un cristal en silicium, a pour but de diviser par quatre les pertes de faisceau

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Using a crystal to extract beam?

Les fils des septa électrostatiques du SPS font 60 μm de diamètre. Plus de 10 000 fils sont nécessaires pour extraire les protons à 400 GeV. Les chercheurs tentent de réduire les pertes sur ces fils à l’aide de cristaux courbés en silicium. (Image : CERN)

L’expérience SHiP (Search for Hidden Particles), actuellement à l’étude dans le cadre du projet Physics Beyond Colliders (PBC) au CERN, a pour objectif la recherche directe de particules cachées pouvant expliquer certains phénomènes au-delà du Modèle standard. Si elle est approuvée, SHiP utilisera des faisceaux du Supersynchrotron à protons (SPS) de 400 GeV, redirigés vers une cible fixe installée au bout d’une ligne de transfert de faisceau de 1 km. 

Mais pour avoir une chance d’identifier d’éventuelles particules cachées, les chercheurs doivent maîtriser le bruit de fond généré lors du bombardement de la cible. L’extraction lente du faisceau du SPS, en diminuant considérablement le taux de protons venant frapper la cible par seconde, permet d’atteindre cet objectif.

La méthode traditionnellement utilisée pour réaliser une extraction lente est appelée « extraction résonante ». Elle permet de produire de longs déversements de l’ordre de la seconde dans la ligne d’extraction. Cette méthode est basée sur l’utilisation de sextupôles d’extraction servant à induire un mouvement instable mais contrôlé aux particules du faisceau. Un septum électrostatique capte alors les protons de plus grande instabilité, qu’il dévie en direction de la ligne d’extraction.

Malheureusement, cette méthode présente un inconvénient majeur et inévitable : au cours de l’opération d’extraction, une petite partie du faisceau est perdu. Or, dans le cas de l’expérience SHiP, pas moins de 4 x 1019 protons par an seront nécessaires. Pour atteindre cet objectif, les pertes doivent être réduites d’environ un facteur quatre. « Les pertes de faisceau ont pour la plupart lieu au niveau du septum électrostatique, explique Brennan Goddard, chef du groupe TE/ABT (Accelerator Beam Transfer). Une technique prometteuse pour minimiser ces pertes consiste à réduire la densité transversale du faisceau en amont du septum, mais, jusqu’à présent, les outils à notre disposition ne nous permettaient pas d’atteindre l’objectif imposé par SHiP. »

Le groupe TE/ABT, en étroite coopération avec la collaboration UA9 et les groupes BE/OP et EN/STI, a approfondi l’idée de recourir à un nouvel outil, déjà utilisé par UA9 pour le projet collimation du LHC : un cristal en silicium courbé. Placé lui aussi en amont du septum, ce cristal canalise le faisceau de façon très efficace, aboutissant à des pertes très réduites. 

« Nous avons conduit les premiers tests en 2016 avec un cristal en silicium de 2 mm de long. Grâce à ce cristal, nous avons pu réaliser, au mois de novembre, un déversement à extraction lente de plusieurs dizaines de minutes d’un faisceau de 270 GeV à très basse intensité, faisceau que nous avons déversé dans la ligne de transfert TT20, explique Brennan Goddard. Prochaines étapes : quantifier les pertes de faisceau pour des intensités plus élevées et développer des cristaux mieux adaptés pour l’extraction. »

Pour ce faire, d’autres études et tests auront lieu dans le SPS en 2017 et 2018.  Si ces tests sont concluants, ce sera une excellente nouvelle pour SHiP et d’autres installations du CERN qui pourraient utiliser cette technologie.

Pour plus d’informations sur l’expérience SHiP, lisez l’article paru dans le Bulletin du CERN 28-29/2015.

Configuration de la future expérience SHiP. Les faisceaux du SPS seront extraits « lentement » au niveau de la longue section droite 2 (LSS2) vers la ligne de transfert TT20. (Image : CERN)