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Les technologies du CERN contribuent à l'étude de l'Univers sombre

Le télescope Euclid de l'ESA, qui vient d’être lancé, s'appuiera sur des logiciels et des infrastructures informatiques du CERN pour cartographier les effets de la matière noire et de l'énergie sombre sur l'Univers

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Euclid space telescope

La sonde spatiale Euclid. (Image: ESA/Euclid/Euclid Consortium/NASA)

Le 1er juillet, à 17:11 CEST exactement, la nouvelle mission de l'Agence spatiale européenne (ESA) a été lancée depuis Cape Canaveral, en Floride (USA), à bord d'une fusée Falcon 9 de la société SpaceX. Baptisé Euclid, le télescope spatial de 2 tonnes, de 4,5 mètres de hauteur et de 3,1 mètres de diamètre servira à cartographier la géométrie de l'Univers, notamment en vue d'étudier la nature de la matière noire et de l'énergie sombre. Euclid, qui est une expérience reconnue par le CERN depuis 2015, s'appuiera sur des logiciels et des infrastructures informatiques clés fournies par le Laboratoire pour traiter de grandes quantités de données.

Comprendre l'évolution de l'Univers est un défi fondamental pour la physique moderne. Les observations astronomiques montrent que le taux d'expansion de l'Univers n'est pas constant ; les scientifiques pointent du doigt l'énergie sombre, et pensent que, par ailleurs, la matière noire explique la structure à grande échelle de l'Univers. Comme leur nom le suggère, la matière noire et l'énergie sombre sont « invisibles » pour les télescopes actuels, parce qu’elles n'interagissent pas avec la lumière comme le fait la matière ordinaire ou « visible ». Grâce à des télescopes comme Euclid, les scientifiques pourront étudier leur effet sur la matière observable, en mesurant par exemple le décalage vers le rouge (redshift) afin d'examiner les minuscules déformations des galaxies et la répartition des galaxies dans l'espace et le temps. Euclid effectuera l'étude la plus complète à ce jour, en analysant la lumière optique en provenance de milliards de galaxies situées jusqu'à 10 milliards d'années-lumière, couvrant ainsi près d'un tiers du ciel. L'objectif consiste à établir une carte de la structure à grande échelle de l'Univers à travers le temps et l'espace.

Pour ce faire, la mission a besoin de grandes quantités de données et d'importantes capacités de traitement de données. C'est là qu'intervient le CERN, qui a l'habitude de traiter et de stocker des données provenant de millions de collisions de particules à haute énergie par seconde. Le CERN participe au segment scientifique au sol (SGS) du programme Euclid. Le SGS est chargé de traiter et d'analyser les données du télescope, et de les fusionner ensuite avec les données des télescopes terrestres afin d'étudier les propriétés de l'énergie sombre et de la matière noire.

Le SGS traitera plus de 850 Gbits d'images compressées par jour, soit la plus grande quantité d'images jamais obtenue par une mission de l'ESA, produisant au final plusieurs dizaines de pétaoctets de données réduites. « Compte tenu de la complexité de l'infrastructure et l'urgence avec laquelle les données doivent être analysées, le soutien apporté par le CERN et son expertise sont essentiels, souligne Luca Valenziano, représentant du Consortium Euclid au CERN. Les données seront réparties dans neuf centres de traitement des données. Grâce à son outil CernVM-FS, le CERN nous permet de déployer efficacement les logiciels dans ces centres, et il continuera d’apporter au segment scientifique au sol d'Euclid un appui pendant toute la durée de sa mission. »

La participation du CERN ne se limite pas à une contribution technologique, les travaux de physique théorique menés au Laboratoire étant étroitement liés à la mission d'Euclid. « Les propriétés exactes des fluctuations de densité des galaxies dépendent de l'histoire de l'Univers dans sa globalité, et des cosmologistes du CERN ont élaboré des cadres théoriques pour les prédire, explique Marko Simonović, du département de Physique théorique du CERN. Les outils développés au CERN notamment seront utilisés par la collaboration Euclid pour comparer des données et des théories, et tester ces dernières au-delà des modèles standard de la cosmologie et de la physique des particules. Toute nouvelle découverte en cosmologie constituera indirectement une nouvelle découverte en physique des particules. » 

Le CERN fait partie du Consortium Euclid, organisation qui rassemble près de 2 000 scientifiques dans 300 laboratoires de 17 pays différents en Europe, aux États-Unis, au Canada et au Japon. Il est chargé de la conception et de la construction des instruments NISP (Near Infrared Spectro-Photometer) et VIS (wide-field visible imager), de la collecte de toutes les données terrestres supplémentaires, ainsi que de l'élaboration de la stratégie d'étude et de la chaîne de traitement des données produisant des images et des catalogues calibrés, ainsi que de l'exploitation scientifique des données.

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