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ALICE : le périple d’un détecteur cosmopolite

Des morceaux de détecteur se sont frayés un chemin à travers le monde pour former le nouveau détecteur interne d’ALICE

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ALICE ITS detector upgrade - Building 167
Les différentes couches du nouveau trajectographe interne d’Alice en train d’être assemblées (Image: Maximilien Brice/CERN)

Les passagers des vols United 577 et 956 reliant San Francisco à Genève, en passant par Newark, ont eu la surprise d’être accompagnés par un voyageur discret, mais inhabituel : en lieu et place d’un humain, l’un des sièges était occupé par un morceau de détecteur. Cette pièce, trop fragile pour effectuer le vol en soute, a en effet été installée sur un siège, à côté de celui de son ange gardien, chercheur au laboratoire de Berkeley (LBNL). Il s’agit de l’un des morceaux du nouveau détecteur interne de l’expérience ALICE qui se sont frayés un chemin à travers le monde pour se retrouver au CERN. Trente-cinq instituts répartis en divers endroits du globe participent en effet à la construction, à l’essai et au prototypage des différentes parties du nouveau système de trajectographie interne d’ALICE.  

ALICE (A Large Ion Collider Experiment) est l’une des quatre grandes expériences auprès du Grand collisionneur de hadrons (LHC). Cette expérience étudie la matière telle qu’elle était juste après le Big Bang, lorsque les composants des noyaux des atomes n’étaient pas liés ensemble. 

Avec la hausse du nombre de collisions d’ions lourds prévue pour la troisième période d’exploitation des accélérateurs du CERN, à partir de 2021, le détecteur d’ALICE augmentera sa vitesse de lecture. Cette augmentation de la vitesse de lecture, combinée à un système de reconstitution en ligne des ensembles de données, permettra à ALICE d’augmenter d’un facteur 100 le nombre d’événements que l’on pourra collecter.  

Afin d’atteindre les objectifs de physique souhaités, de nombreuses améliorations sont réalisées durant le long arrêt technique en cours. L’un des chantiers concerne le système de trajectographie interne, qui entoure le tube de faisceau. Ce détecteur reconstitue la trace des particules chargées et sa précision est cruciale pour les analyses de physique. L’amélioration apportera donc une meilleure précision, notamment pour la détection des particules à courte durée de vie. 

L’actuel trajectographe interne sera remplacé par un système de sept couches cylindriques composées uniquement de pixels ; le système précédent comprenait six couches, mais seules les deux couches internes étaient composées de pixels, alors que les quatre couches externes comprenaient des capteurs de silicium moins précis. Le nouveau système de trajectographie interne sera composé de 12,5 milliards de pixels installés sur une surface d’environ 10 m2. Ces pixels ont été développés spécifiquement pour supporter un rythme plus élevé de collisions et parvenir à une granularité fine. Les puces intègrent ainsi à la fois le capteur à pixels et le système de lecture, ce qui permet une réduction de la masse du détecteur d’un facteur quatre par rapport à l’ancien détecteur. Cette réduction de la masse rend possible une meilleure précision et une meilleure efficacité lors de la reconstruction des trajectoires des particules.  

La construction de toutes les structures mécaniques a été achevée l’année dernière. Les différentes parties du détecteur sont arrivées au CERN, et les équipes du CERN commencent maintenant leur assemblage en deux demi-tonneaux. La disponibilité rapide des composants du détecteur a permis de commencer leur mise en service. L’installation finale du détecteur dans la caverne expérimentale est prévue pour l’été prochain.