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MADMAX et l'aimant Morpurgo du CERN

MADMAX, une nouvelle collaboration, va utiliser un aimant du CERN, appelé Morpurgo, pour tester son prototype de détecteur de matière noire

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Magnet Morpugo zone north
L’aimant Morpurgo, situé dans la zone Nord, sur le site de Prévessin, fournira un champ magnétique de 1,6 tesla pour le prototype MADMAX (Image: CERN)

MADMAX se prépare à faire escale au CERN à partir de 2022. Si Mel Gibson, sa machine et sa soif de revanche ne seront pas de la partie, une poignée de physiciens armés d'un ancien aimant rechercheront de la matière noire dans la zone Nord du CERN (qui n'est pas un terrain vague postapocalyptique).

La collaboration MADMAX (MAgnetized Disks and Mirror Axion eXperiment), extérieure au CERN, cherche modestement à déterminer la nature de la matière noire et à résoudre l'énigme de l'absence de violation de la symétrie charge-parité (CP) dans le secteur fort en détectant une particule qui, depuis des décennies, échappe aux physiciens : l'axion.

Pour ce faire, la collaboration a développé un tout nouveau concept qui utilise un booster composé de disques diélectriques et de miroirs. Le booster agit comme un résonateur afin d'amplifier le flux de photons que les axions produiraient dans un champ magnétique. Afin de valider ce concept, le prototype doit être testé dans un champ magnétique spécifique avant le démarrage de l’expérience, qui sera située à DESY en Allemagne.

Obtenir ce champ magnétique est difficile, mais la collaboration peut compter sur l'aide du CERN. Le 16 septembre, la Commission de la recherche du CERN a accepté que le prototype MADMAX se serve d'un ancien aimant utilisé dans le passé par l'expérience ATLAS. L'aimant « Morpurgo » se trouve dans la zone Nord du CERN et génère un champ allant jusqu'à 1,6 tesla. C'est l'un des premiers aimants supraconducteurs à avoir été utilisé au CERN. Plus de 40 ans après sa première utilisation par l'expérience NA3 (North Area 3) en 1978, cet aimant robuste teste toujours les sous-détecteurs d'ATLAS. Les physiciens de MADMAX profiteront de la période hors faisceau de l'expérience ATLAS pour monter et tester leur prototype sur l'aimant. C'est une solution qui convient à tout le monde : d'une part, MADMAX pourra utiliser gratuitement un aimant qui répond aux critères appropriés pour le test du prototype, et, d'autre part, l'expérience ATLAS profitera d'une réorganisation et d'une optimisation de l'espace autour de l'aimant, rendues nécessaires pour la mise en place du dispositif testé.

Dans un souci de pragmatisme et de développement durable, le recyclage et la valorisation des équipements sont monnaie courante au CERN. Grâce aux générations successives d'équipements, des accélérateurs à la pointe du progrès deviendront des injecteurs pour leurs successeurs et de vieux aimants seront réutilisés pour de nouvelles expériences. Par exemple, l'expérience CAST utilise un vieux dipôle prototype du LHC pour chercher, justement, des axions.

Toutefois, permettre à des scientifiques extérieurs au CERN, comme ceux de la collaboration MADMAX, d'utiliser un équipement du Laboratoire, est loin d'être anodin. Selon Pascal Pralavorio, le contact CERN pour MADMAX, ces échanges permettent de développer de nouvelles idées : « Aujourd'hui, les physiciens des particules recherchent une nouvelle physique dans de nombreuses directions, ce qui aboutit naturellement à des expériences fondées sur des concepts innovants. Pour valider ces concepts, nous devons exploiter au mieux les équipements qui sont déjà disponibles, et c'est ce que MADMAX et le CERN font avec l'aimant Morpurgo. »

Les efforts déployés de longue date par le CERN pour appuyer la science dans le monde entier se manifestent par des collaborations, par la réalisation de prototypes et par le don d'équipements, entre autres, et se poursuivront dans le futur. Nous souhaitons beaucoup de succès aux scientifiques de MADMAX dans leur quête des insaisissables axions.