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Roger Bailey (1954 – 2023)

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Roger au centre, de face, lors de la mise en service du LHC. (Image: CERN)

C'est avec une immense tristesse que nous avons appris le décès de Roger Bailey, survenu le 1er juin lors d'une sortie en VTT dans le Valais. Il avait 69 ans. Après avoir obtenu un doctorat en physique des particules expérimentale à l'Université de Sheffield en 1979, Roger occupe jusqu'en 1983 un poste de postdoctorant au Laboratoire Rutherford Appleton. Tout au long de cette période, il travaille sur des expériences auprès du Supersynchrotron à protons (SPS) du CERN ; il est basé au Laboratoire à partir de 1977. En 1983, il rejoint le groupe Opérations du SPS ; il y sera responsable de l'exploitation de l'accélérateur jusqu'en 1989. Il travaillera ensuite auprès du Grand collisionneur électron-positon (LEP), jouant un rôle de premier plan, depuis la mise en service de la machine jusqu'à son exploitation. À la fin des années 1990, il sera nommé chef du groupe Opérations du LEP.

Après l'arrêt du LEP en 2000, Roger s'implique progressivement dans le projet LHC, planifiant et constituant l'équipe chargée de la mise en service avec faisceau. Il participe activement aux premières opérations du LHC jusqu'en 2011, date à laquelle il devient directeur de l'École du CERN sur les accélérateurs (CAS) ; transmettant sa vaste expérience, il inspirera les nouvelles générations de physiciens des accélérateurs.

Les personnes qui ont été amenées à travailler avec Rog le considéraient invariablement comme un ami : cela n'a rien d'étonnant, vu son aisance, sa gentillesse et sa générosité d'esprit. Rog était direct, sans jamais être blessant ; son bon sens et son pragmatisme étaient alliés à humour subtil pince-sans-rire. Nous nous sommes bien amusés au cours de ces années, qui ont été une époque fabuleuse pour le Laboratoire, et c’est avec jubilation aujourd’hui que nous nous remémorons certaines de ses réparties, malgré la tristesse causée par sa disparition prématurée.

Rog posait un regard passionné et espiègle sur la vie et il n’avait pas peur de tout ce qu'elle pouvait apporter. C’était un aventurier dans l'âme, que ce soit quand il dévalait la montagne ou quand il arpentait les rues de New York, Berlin ou Chicago. Il était très doué pour faire des trouvailles dans les bacs des disquaires, et aussi pour s’entretenir affablement avec tout le monde.

Une cérémonie en hommage à la vie de Roger a eu lieu le vendredi 16 juin face aux pistes de Verbier, qu’il a beaucoup fréquentées avec ses amis. Au cours de la cérémonie, l'un de ses poèmes intitulé « It's a Wrap », révélant le point de vue philosophique d'un physicien sur la vie dans l'Univers, a été lu par sa fille Ellie. Trois amis proches sont revenus de façon émouvante sur des moments de sa vie, et une version revue et corrigée pour Roger d'un poème de Roger McGough, intitulé « Big Hugs », a été lue. Le premier vers de ce poème nous interpelle : « Before I go, who do I give a hug to? » (Avant de partir, qui vais-je embrasser ?) – Pour Roger, la liste était longue.

Deux de ses citations préférées ont également été lues pendant la célébration :

« You only live once, but if you do it right, once is enough. » (On ne vit qu'une fois, mais si l'on s'y prend bien, une fois suffit) - Mae West.

« Our death is not an end if we can live on in our children and the younger generation. For they are us, our bodies are only wilted leaves on the tree of life. » (Notre mort n'est pas une fin si nous pouvons continuer à vivre à travers nos enfants et la jeune génération. Car ils sont nous, nos corps ne sont que des feuilles flétries sur l'arbre de la vie) - Albert Einstein.

Et son fils, Rob, a quant à lui cité une phrase de Hunter S. Thompson :

« Life should not be a journey to the grave with the intention of arriving safely in a pretty and well-preserved body, but rather to skid in broadside in a cloud of smoke, thoroughly used up, totally worn out, and loudly proclaiming “Wow! » What a Ride! » (La vie ne doit pas être un parcours qu’on entreprend dans l'intention d'arriver dans la tombe sans dommage dans un corps bien conservé ; ce qu’il faut, c’est arriver en dérapant dans un nuage de fumée, complètement usé, totalement épuisé, et en s'exclamant « génial ! quel parcours ! »)

Bravo, Rog, pour ton parcours !

Ses amis et collègues du CERN