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Physiciens théoriciens et expérimentateurs : séparés, mais plus proches

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Eckhard Elsen is Director for Research and Computing

Comment le département de Théorie contribue aux recherches en constante évolution de la physique des particules et au programme du CERN

Il y a un an, quand la nouvelle Direction a commencé à envisager de séparer la physique théorique et expérimentale en deux départements distincts, le choix a été fait rapidement. Le nouveau département Théorie du CERN est peut-être petit en termes d'effectifs, mais il accueille un grand nombre de scientifiques de renommée mondiale tout au long de l'année.

Il est clair pour moi qu’un centre de physique fondamentale de premier rang dans le monde se doit de disposer d'une activité indépendante et dynamique en physique théorique. La création d'un département Théorie a répondu à cette attente, et, paradoxalement peut-être, a également contribué à rapprocher les théoriciens et les expérimentateurs.

L'un des objectifs essentiels de la physique théorique au CERN est de faire le lien de façon à permettre à la théorie d’être mise à l’épreuve par nos expériences. Aujourd’hui, cela signifie rendre possible une physique de précision auprès d’un collisionneur de hadrons, une tâche devenue urgente au vu de l’exceptionnelle performance du LHC en 2016.

La fameuse « bosse » observée à 750 GeV illustre parfaitement le dynamisme des rapports entre théorie et expérimentation. Le pic enregistré par ATLAS et par CMS, que nous aurions tous voulu pouvoir interpréter comme une véritable découverte plutôt qu'une simple fluctuation statistique, a néanmoins poussé les théoriciens à examiner la flexibilité des marges du Modèle standard. Leurs nombreuses tentatives, rivalisant d’ingéniosité, visant à intégrer cette « bosse » dans des extensions du Modèle standard serviront pour de futures études expérimentales.

Les théoriciens du CERN travaillent sur plusieurs fronts. Le Centre de physique du LHC du CERN (LPCC) sert depuis de nombreuses années d'interface principale, au niveau local, entre physique et expérience. En plus d'assurer la liaison courante entre les équipes de la théorie et celles de la physique expérimentale, le centre est également le lieu où sont explorées de nouvelles pistes avant l'installation des détecteurs. La physique à petits angles menée au LHC, qui a connu récemment d'importants développements grâce au LPCC, est un bon exemple.

Les instituts de physique que le département accueille régulièrement jouent également un rôle majeur dans la vie scientifique du CERN. Leur présence contribue en effet à l'optimisation de la puissance intellectuelle du département Théorie, dans la mesure où des questions scientifiques de pointe sont examinées avec des scientifiques réputés venus du monde entier. Ce sera le cas lors de la réunion sur les étoiles à neutrons qui aura lieu prochainement.

Les activités récentes du département Théorie reflètent le caractère évolutif de la physique des particules et du programme de recherche du CERN. Un des projets consiste à explorer la meilleure façon d'exploiter la diversité des installations du CERN, dans la perspective d'une physique au-delà des collisionneurs. Un autre voit plus loin encore : une activité sur les neutrinos, récemment mise sur pied en collaboration avec des théoriciens de renommée mondiale, spécialistes des neutrinos, séjournant pour de longues périodes au CERN.

Cette initiative est à mettre en regard de la création d’un nouveau groupe de physiciens des neutrinos au département Physique expérimentale. Ces groupes examineront le paysage mondial de la physique des neutrinos et constitueront une ressource pour les utilisateurs du CERN qui souhaitent travailler avec des programmes neutrinos ici ou ailleurs. Voilà un bon exemple de la réorganisation qui s'opère dans notre discipline afin de permettre à la communauté mondiale de la physique de mieux coordonner et de mieux utiliser des installations réparties dans le monde entier.

Notre département Théorie étudie non seulement l'infiniment petit, mais aussi l'infiniment grand. Pendant que le CERN met ses ressources à la disposition de collaborations qui travaillent dans des disciplines voisines, dans le cadre du programme des expériences reconnues, de leur côté, nos théoriciens s’intéressent également à des disciplines telles que la cosmologie, par exemple. Le CERN devient ainsi le lieu idéal pour les réunions de collaboration des expériences reconnues, et c’est une excellente chose pour le CERN.

Fort de toutes ces activités, le département Théorie du CERN devient ainsi une source indispensable pour un laboratoire expérimental et pour l'ensemble de la communauté. Ce n'est qu'en travaillant main dans la main que les théoriciens et les expérimentateurs font progresser la connaissance, en tant que partenaires égaux travaillant pour une cause commune.