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Tests réussis pour un mode de transport de l’électricité plus efficace

La nouvelle ligne supraconductrice de transport d’électricité pour le LHC à haute luminosité a franchi une nouvelle étape vers sa mise en service

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Superconducting link demonstrator system bench for the High-Luminosity LHC in SM18
La ligne électrique supraconductrice au moment de son essai. De gauche à droite : Julien Hurte, Jerome Fleiter, Alejandro Zurita et Amalia Ballarino, responsable du projet. (Image: CERN)

Le gros tuyau qui serpente dans un hall high-tech du CERN a des allures de python métallique. En réalité, il s’agit d’une ligne de transmission électrique inédite. Cette ligne supraconductrice préfigure celles qui seront très probablement utilisées à l’entrée des villes dans le futur. Elle est en effet capable de transporter d’énormes quantités de courant électrique dans un diamètre restreint. 

Cette ligne de 60 mètres de long a été développée pour le futur accélérateur du CERN, le LHC à haute luminosité, qui devrait entrer en service en 2026. Testée depuis l’année dernière, elle a transporté jusqu’à 40 000 ampères, soit jusqu’à 20 fois plus que ce qui peut l’être avec des câbles en cuivre ordinaires de section similaire à température ambiante. Formée d’un supraconducteur à base de diborure de magnésium (MgB2), elle ne présente par conséquent aucune résistance et peut transporter des densités de courant bien plus élevées que des câbles résistifs ordinaires, sans aucune perte. Le hic, c’est que pour fonctionner à l’état supraconducteur, le câble doit être refroidi à une température de 25 kelvins (-248°C). Il est ainsi inséré dans un cryostat, un tuyau thermiquement isolé dans lequel le réfrigérant, de l’hélium gazeux, circule. La prouesse est d’avoir développé une nouvelle ligne supraconductrice flexible à base d’un nouveau supraconducteur (MgB2). « La ligne est ainsi beaucoup plus compacte et légère que son équivalent en cuivre, et elle est cryogéniquement plus efficace qu’une liaison supraconductrice basse température classique qui doit être refroidie à 4,5 K », explique Amalia Ballarino, responsable du projet. 

Après avoir démontré la faisabilité d’une telle ligne, l’équipe a testé fin mars son interconnexion au système qu’il doit alimenter. Dans le LHC à haute luminosité, ces lignes relieront des convertisseurs de puissance, qui transforment le courant en provenance du réseau, à certains aimants. Ces convertisseurs sensibles aux radiations doivent être éloignés de l’accélérateur. Les nouvelles lignes de transmission supraconductrices, mesurant jusqu’à 140 m de long, pourront alimenter plusieurs circuits et transporter jusqu’à 100 000 ampères.

« La connexion du câble de diborure de magnésium aux amenées de courant qui alimentent les aimants est assurée par des supraconducteurs à haute température ReBCO (Rare earth - Barium - Copper Oxide), ce qui est également une nouveauté », explique Amalia Ballarino. Ces supraconducteurs sont dits « à haute température » car ils peuvent fonctionner jusqu’à environ 90 kelvins (-183°C) contre quelques kelvins pour les supraconducteurs basse température. Ils peuvent transporter des densités de courant très élevées. Leur mise en œuvre est très compliquée, d’où la prouesse réalisée par l’équipe.

Les essais de la ligne avec sa nouvelle interconnexion représentent une étape importante dans le projet : le système complet a prouvé qu’il fonctionnait. « Nous disposons de nouveaux matériaux, d’un nouveau système de refroidissement et de technologies inédites pour alimenter les aimants de manière innovante », se félicite Amalia Ballarino. 

Le projet a d’ailleurs retenu l’attention du monde extérieur. Des entreprises utilisent les travaux menés au CERN pour étudier la possibilité d’utiliser des lignes de transport à haute tension similaires pour le transport d’électricité et de puissance sur une longue distance, en substitution aux systèmes conventionnels.