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François Piuz (1937 – 2022)

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François Piuz, physicien très talentueux et passionné, nous a quittés le jeudi 21 juillet 2022 à l'âge de 85 ans. Il était au CERN depuis 1968 et y avait dirigé plusieurs projets. Tout au long de sa remarquable carrière, François a travaillé sur des techniques d'avant-garde pour les détecteurs de particules. Doté de talents nombreux, il a apporté des contributions importantes à la recherches sur différents sujets, allant des principes fondamentaux de fonctionnement d'un détecteur aux technologies innovantes requises pour déployer les détecteurs dans de grandes expériences. Il avait commencé son parcours scientifique au début des années 1970 au sein de l'équipe qui a transformé le concept de chambre proportionnelle multifils), couronné par un prix Nobel, en un système à 50 000 fils pour le détecteur à aimant à champ fractionné auprès des anneaux de stockage à intersections (ISR). À cette époque, François voulait comprendre le fonctionnement de ces nouveaux détecteurs au niveau fondamental, microscopique. Ses travaux sur les « clusters d'ionisation » dans une chambre proportionnelle multifils sont désormais un classique, et ont joué un rôle déterminant dans le développement de techniques d'identification des particules s'appuyant sur des mesures multiples de l'ionisation, techniques qui ont ultérieurement été largement exploitées dans de nombreuses expériences.

Une application spectaculaire de cette méthode est le système de détection de rayons X par le détecteur de rayonnement de transition d'ALICE, auprès du Grand collisionneur de hadrons (LHC). Une autre retombée de cette avancée des connaissances a été le développement d'une topologie de chambre à dérive innovante, permettant de mesurer les particules avec une résolution spatiale exceptionnelle et une excellente séparation entre traces, utilisée pour les expériences du SPS dans les années 1980. S'intéressant à nouveau à l'identification des particules, il a contribué à des études pionnières démontrant le potentiel exceptionnel des photocathodes en iodure de césium (CsI) solide pour la détection des photons Tchérenkov, s'avéreront si efficaces dans le compteur Tchérenkov à focalisation annulaire (RICH) du détecteur HMPID d'ALICE.

En 1992, François a été l'un des principaux initiateurs du projet RD26, dont il a été co-porteparole, projet qui a abouti en six ans à la technologie permettant de produire des détecteurs de photons en milieu gazeux à base de CsI de grande superficie (jusqu'à 0,3 m2) destinés à être utilisés dans les systèmes RICH conçus pour des expériences de collision d'ions lourds. Ce projet a représenté le point culminant de sa brillante carrière scientifique, au cours de laquelle il a su associer son excellente connaissance des détecteurs à gaz, acquise lors de sa collaboration avec Charpak, avec sa passion pour la photographie et, par voie de conséquence, la détection des photons. Cette technologie a permis la construction du plus grand détecteur RICH à CsI jamais réalisé et a trouvé rapidement des applications dans d'autres expériences, notamment le détecteur TIC de NA44 et le détecteur RICH de COMPASS, auprès du SPS, le système RICH de HADES au GSI, ou encore le détecteur RICH destiné à l'expérience du hall A au JLAB.

François a été membre de la collaboration ALICE dès sa création, et il a dirigé le projet HMPID jusqu'en 2000. Après son départ en retraite, en 2002, il a continué à participer activement à la construction, l'installation et l'exploitation du HMPID, détecteur qui a eu une très bonne performance au cours des dix premières années de la campagne de physique d'ALICE. Près de deux décennies après sa construction, le HMPID continue à fonctionner, à des cadences plus élevées, pour la troisième période d'exploitation. François a également coordonné les activités de faisceau d'essai, qui ont servi aux travaux de R&D pour tous les détecteurs d'ALICE.

Ses connaissances remarquables et sa capacité d'imaginer des solutions à des problèmes complexes ont joué un rôle essentiel dans le succès des nombreux projets de détecteur auxquels il a travaillé. Il était toujours intéressé par les idées nouvelles et prêt apporter son concours et son soutien à ses collègues. Cette attitude, ainsi que sa gaieté et son humour, contribuaient à sa personnalité chaleureuse et charismatique. Il sera très regretté, et tous ceux qui ont eu la chance de travailler à ses côtés se souviendront de ses remarquables qualités, aussi bien en tant que physicien qu'en tant que personne.

Nous présentons nos plus sincères condoléances à sa famille, à ses proches collaborateurs et à ses amis.

Ses amis et collègues