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Boîte à outils pour « réparer » les relations de travail

Comment aider le personnel du Laboratoire à résoudre les conflits à la source, avant d’avoir besoin de faire appel à l’ombud ?

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Comment aider le personnel du Laboratoire à résoudre les conflits à la source, avant d’avoir besoin de faire appel à l’ombud ?

Lors de la conférence de l’International Ombudsman Association, à laquelle j’ai participé en avril dernier, l’une des intervenantes[1], Patricia Robinson, a présenté un modèle simple que les managers peuvent utiliser pour avoir des échanges productifs avec leurs supervisés, les aider à avoir de meilleures relations de travail et favoriser le sentiment d’appartenance. Ce modèle permet de comprendre ce qui est important pour chacune des parties, d’apaiser les tensions au sein des équipes et de cerner la source du conflit.

La première étape pour résoudre un conflit à la source est de faire en sorte que les parties se sentent vraiment écoutées, en cherchant à comprendre le QUOI, le QUI, le COMMENT et le POURQUOI.

L’intervenante nous ayant invités à diffuser ce modèle, et celui-ci me semblant être tout à fait adapté aux situations auxquelles j’ai été confrontée dans ma fonction d’ombud, je me fais un plaisir de le partager avec vous et de vous montrer comment l’utiliser à l’aide d’un exemple concret.

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Appliquons maintenant ce modèle à une situation concrète :

Maria partage un bureau avec Anne ; leurs postes de travail sont l’un en face de l’autre. Malgré les efforts de Maria pour cultiver de bonnes relations de travail avec Anne, cette dernière ne veut pas parler avec Maria de sujets qui ne sont pas liés au travail : pas de conversations à propos des enfants ou des vacances, pas de sourires, pas de café, pas de plaisanteries. Maria, qui est une personne joviale et très sociable, souffre de cette situation et en parle à Andrew, son manager.

Voici comment Andrew a montré à Maria qu’il avait vraiment entendu ses préoccupations et qu’il comprenait la situation de son point de vue à elle.

Maria : « Ça ne peut plus durer. Quand je suis avec Anne, j’ai l’impression d’être en face d’un mur. Pas de sourires, pas de bavardages, alors qu’elle se comporte tout à fait normalement avec les autres collègues. »

Andrew : « Je vois que cette situation te touche beaucoup. Parle-moi un peu plus de ce qui ne va pas avec Anne. À quoi ressemble une journée type au bureau ? »

Maria, encouragée – avec empathie – à donner des exemples concrets, donne des explications.

Andrew : « Voyons si j’ai bien compris la situation. Anne reste absorbée dans ses tâches et ne répond pas lorsque tu lui dis bonjour, lorsque tu lui demandes comment elle va ou lorsque tu lui proposes d’aller prendre un café. Tu as aussi l’impression qu’elle n’a pas la même attitude avec les autres. C’est bien cela ? Est-ce que j’ai bien compris ? »

Maria confirme, sentant qu’elle a toute l’attention de son manager.

Andrew : « Anne travaille ici depuis dix ans et elle est très appréciée de l’équipe, même si, en effet, c’est quelqu’un qui ne parle pas beaucoup. Elle est très compétente dans ce qu’elle fait. Cela fait peu de temps que tu as rejoint l’équipe, et nous apprécions tous ta bonne humeur et ta nature sociable. Anne et toi avez toutes les deux beaucoup de travail et un emploi du temps très chargé, mais vous faites toutes les deux du bon travail. As-tu l’impression que votre relation est toujours difficile, ou est-ce qu’il y a des moments plus difficiles que d’autres, en début de semaine ou de journée par exemple ? »

Maria – à présent consciente des points communs qu’elle a avec Anne – donne des précisions.

Andrew : « Qu’est-ce que tu ressens dans ces cas-là ? Est-ce que tu y penses encore quand tu rentres chez toi ? Est-ce que cela a un impact sur tes relations avec les autres membres de l’équipe ? À ton avis, que ressent Anne ? »

Maria – encouragée à parler de ce qu’elle ressent – réfléchit une minute et explique qu’elle se sent à la fois déçue, triste et en colère. Elle est soulagée de pouvoir exprimer ses émotions.

Andrew : « D’accord, je vois. Si je te comprends bien, tu es triste et en colère parce qu’Anne semble ne pas avoir envie d’entretenir une relation amicale avec toi en tant que collègue et tu te sens rejetée. C’est bien cela ? »

Maria confirme et a le sentiment que ses émotions ont été comprises.

Andrew : « Qu’est-ce qui fait que tu te sens rejetée et triste ? Est-ce parce que l’absence de sourire est contagieuse et que cela va à l’encontre de ta nature ? Comment cela se passait-il dans ton précédent emploi ? Est-ce aussi possible que tu craignes qu’Anne puisse dire des choses négatives lorsque la prolongation de ton contrat sera examinée ? »

Maria confirme que, en effet, elle avait une très bonne relation avec une collègue dans son précédent emploi et que cette ambiance de travail lui manque. Elle est déçue de ne pas avoir réussi à recréer dans son nouvel emploi cette ambiance à laquelle est était habituée. Elle craint également que ses difficultés relationnelles avec Anne puissent avoir un impact sur la durée de son contrat et trouve que ce serait injuste.

Andrew : « Je comprends que tu as besoin de te sentir acceptée et intégrée dans l’équipe et qu’il est très important pour toi d’avoir des relations de travail amicales et chaleureuses avec tes collègues de bureau. C’est bien cela ? Merci d’être venue m’en parler. Je vais réfléchir à la meilleure manière de procéder. »

Comme vous pouvez le voir, la boîte à outils n’a pas servi à résoudre le conflit entre Maria et Anne, mais elle a permis à Andrew de montrer à Maria qu’elle était écoutée et comprise et d’obtenir des informations importantes sur la cause profonde du conflit.

 Ces deux éléments ouvrent la voie à une résolution informelle du conflit. Par la suite, Andrew devra avoir la même conversation avec Anne.

Lorsqu’une personne supervisée s’adresse à vous concernant une situation conflictuelle, la première étape de la résolution consiste à lui montrer qu’elle est vraiment écoutée. Gardez cette boîte à outils à l’esprit pour réussir cette première étape.

*Les prénoms ont été modifiés                

Laure Esteveny

J’attends vos réactions, n’hésitez pas à m’envoyer un message à ombud@cern.ch. De même, si vous avez des suggestions de sujets que vous aimeriez voir traiter, n’hésitez pas non plus à m’en proposer.

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[1] Patricia Robinson, Université Hitotsubashi, Tokyo (Japon)