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n_TOF joue à cache-cache avec le lithium cosmologique

La collaboration n_TOF apporte de nouveaux éléments sur l’énigme du lithium cosmologique

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n_TOF plays hide-and-seek with cosmological lithium

Nova Centauri 2013, l'étoile la plus brillante au centre de cette image, est la première étoile nova (explosion d'étoile) dans laquelle du lithium a été détecté. Il a pu être identifié dans les éléments éjectés par l'étoile. (Image: ESO)

Une expérience de l'installation n_TOF vient d'apporter une pièce manquante au puzzle du lithium cosmologique. La collaboration n_TOF a en effet publié une étude comportant une nouvelle mesure de précision d’un processus participant à la production cosmique du lithium. 

La quantité observée de cet élément est en effet beaucoup plus faible que celle prédite par la théorie. La théorie qui décrit la production des noyaux pendant les phases primordiales de l’Univers – la nucléosynthèse du Big Bang – suppose que l’ensemble des éléments les plus légers et les plus abondants de l’Univers (l’hydrogène, l’hélium et le lithium) se sont formés juste après le Big Bang. Or, si les observations et la théorie coïncident parfaitement dans le cas de l’hydrogène et de l’hélium, la quantité de lithium effectivement observée est environ trois fois plus faible que celle prédite par la théorie. Cet écart est appelée le problème du lithium cosmologique.

Selon l’une des explications avancées, cette divergence pourrait être liée à la transformation d’un isotope instable du béryllium, le béryllium-7, en lithium. La quantité de lithium cosmologique est pour l’essentiel déterminée par la production et la destruction du béryllium-7: plus il y a de béryllium-7, plus le lithium est abondant, mais si le béryllium est détruit, pour une raison ou une autre, la quantité de lithium baisse en conséquence. Ainsi, le fait que la valeur prédite par la théorie soit plus élevée pourrait s’expliquer par une sous-estimation de la destruction du béryllium-7 primordial, notamment lors de réactions avec des neutrons.

Les estimations théoriques de la probabilité de la destruction du béryllium-7 dans une réaction particulière, ayant comme produit final deux noyaux d’hélium, se fondent sur une seule et unique mesure, réalisée en 1963 auprès du réacteur Ispra, en Italie.

Dans la deuxième zone expérimentale de n_TOF, construite récemment, le détecteur est connecté au système de lecture avant la prise de données. Le faisceau de neutrons, venant d'en-dessous, frappe la cible de béryllium située dans le cube noir.

La collaboration n_TOF a effectué de nouvelles mesures, plus précises.  En particulier, la réaction entraînant la destruction du béryllium-7 et ayant deux noyaux d’hélium comme produit final, a été mesurée pour la première fois pour une vaste gamme d’énergies des neutrons et avec un haut degré de précision. Cette mesure a été rendue possible par la luminosité extrêmement élevée du faisceau de neutrons dans EAR2, zone d’expérimentation récemment construite auprès de l’installation n_TOF.  « La nouvelle installation EAR2 donne la possibilité de réaliser ce type de mesures difficiles », explique Enrico Chiaveri, porte-parole de la collaboration n_TOF.

Les résultats indiquent que, aux énergies pertinentes pour l’étude de la nucléosynthèse du Big Bang, la probabilité de cette réaction entraînant la destruction du béryllium-7 est dix fois inférieure à celle utilisée dans les calculs théoriques. Cela signifie que le taux de destruction est encore plus faible que supposé jusqu’ici, et que ce n’est pas de ce côté-là que se cache la solution au problème du lithium cosmologique. Le mystère reste donc entier, et peut-être qu’il faudra chercher la réponse dans d’autres scénarios, ou dans la physique au-delà du Modèle standard.


Voir l’article scientifique (en anglais), publié dans la revue Physical Review Newsletter (PRL) ici.