La collaboration AWAKE a franchi une étape majeure. Au cours de la dernière semaine d'exploitation des accélérateurs du CERN pour l'année 2016, elle a observé une forte modulation de paquets de protons de haute énergie dans le plasma, indiquant la présence de champs électromagnétiques intenses. Cela représente un pas décisif dans l'utilisation de la technique du champ de sillage plasma entraîné par des protons pour accélérer des électrons.
Le dispositif d'AWAKE a été mise en service avec succès entre les mois de juin et de novembre et l'expérience a recueilli ses premières données au cours de la dernière semaine d'exploitation des accélérateurs du CERN pour l'année 2016.
L’expérience AWAKE (Advanced Proton Driven Plasma Wakefield Acceleration Experiment) étudie l’utilisation de champs de sillage plasma entraînés par des protons pour accélérer des particules chargées. Une première !
« Générer des champs de sillage est particulièrement intéressant avec les énergies élevées des faisceaux de protons du SPS et du LHC, explique le porte-parole d'AWAKE, Allen Caldwell, de l'institut Max Planck pour la physique de Munich, Cela permet de réaliser des plages d'accélération plus longues qu'avec les autres technique.»
L'expérience AWAKE injecte un « paquet de protons pilote » en provenance du Supersynchrotron à protons (SPS) du CERN dans une cellule de plasma créée par ionisation d’un gaz à l’aide d’un laser. Lorsque ce paquet interagit avec le plasma, il se divise en plusieurs petits paquets, un processus connu sous le nom d'automodulation. En traversant le plasma, ces paquets plus courts produisent un fort champ de sillage. L'équipe AWAKE a déduit qu'un champ de sillage avait été créé en détectant les signaux produits par ce processus d'automodulation.
L'étape suivante consiste à injecter un deuxième faisceau d’électrons, le « faisceau témoin », pendant la phase appropriée, derrière le faisceau de protons. Alors, à la manière d’un surfeur glissant sur une vague, les électrons sont ensuite accélérés par le champ de sillage des protons.
L'utilisation du plasma pour accélérer les particules pourrait être une alternative aux méthodes traditionnelles reposant sur des cavités électromagnétiques radiofréquence. On sait depuis longtemps que les plasmas peuvent résister à des champs électriques très puissants. Le défi pour les chercheurs consiste alors à déterminer la meilleure façon de mettre cette faculté à profit pour créer de futurs accélérateurs de particules compacts et puissants à un prix raisonnable. Les champs accélérateurs produits par les champs de sillage plasma entraînés par des faisceaux de protons pourraient être 1000 fois plus puissants que ceux générés par les cavités radiofréquence traditionnelles.
« Le fait d'avoir pu observer pour la première fois des signaux indiquant l'automodulation d'un paquet de protons après une seule semaine de tests est une grande réussite. Ce résultat a été obtenu par une équipe dévouée et très motivée», se félicite Edda Gschwendtner, chef du projet AWAKE au CERN et coordinatrice technique.
« Nous avons l'intention d'étudier le processus en détail l'année prochaine. Nous espérons ainsi démontrer que les électrons accélèrent dans le sillage d'un paquet de protons », ajoute Patric Muggli, coordinateur de physique d'AWAKE, de l'Institut Max Planck pour la physique de Munich.
Ce résultat passionnant, qui est l'aboutissement de trois années de préparation intense, annonce une ère nouvelle en matière de développement d’accélérateurs de particules au CERN et dans le monde entier.