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Les deux premiers accélérateurs redémarrent

Fin du deuxième long arrêt pour le Booster du PS qui est le premier accélérateur avec le Linac 4 à être mis en service

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Various view of the PSB with upgrade complete
La zone où se croisent la ligne d’injection du faisceau dans le Booster du PS (à droite) et la ligne d’extraction du faisceau vers le PS (à gauche). Ces deux lignes de transfert ont été entièrement changées. On aperçoit la boucle du Booster sur la gauche (Image: CERN)

Le Centre de contrôle du CERN retrouve l’ambiance des « shifts », des écrans sur lesquels défilent les caractéristiques des faisceaux et des cafés à toute heure du jour ou de la nuit. Vendredi 3 juillet, l’équipe chargée de la coordination du deuxième long arrêt technique (LS2) dans les accélérateurs a remis la clé du Booster du PS aux opérateurs des accélérateurs. Le Linac 4 et le Booster du PS sont ainsi les deux premiers accélérateurs à être mis service, un an et demi après le début du LS2.

La remise en service sera cependant plus complexe qu’un simple tour de clé. Lorsqu’ils ont confié le Booster aux équipes du LS2, les opérateurs conduisaient un modèle du siècle dernier. Les voilà maintenant au volant d’un bolide métamorphosé. Le moteur (l’alimentation et les convertisseurs de puissance), l’accélérateur (les cavités radiofréquence), la direction (les aimants), l’injection, le circuit de refroidissement, les systèmes de contrôle et de sécurité, etc., un très grand nombre d'équipements ont été changés ou améliorés (voir ci-dessous). « Environ 40% de la machine a été remplacée », indique David Hay, le « garagiste en chef », autrement dit l’ingénieur chargé de la coordination des activités LS2 pour le Booster du PS.

Menés dans le cadre du projet d’amélioration des injecteurs du LHC (LIU), les travaux sur l’accélérateur quasi cinquantenaire répondent à deux exigences : accélérer des particules à plus haute énergie en provenance du tout nouveau Linac 4 et augmenter la brillance du faisceau, autrement dit sa concentration en particules.

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David Hay, chargé de la coordination du LS2 pour le Booster du PS, remet une clé symbolique à Bettina Mikulec, chargée de l’équipe d’exploitation du Booster du PS et du Linac 4 (BE-OP-PSB). À gauche, Julie Coupard, responsable de la coordination du LS2 pour les injecteurs, à droite, Gian Piero Di Giovanni, responsable du projet LIU pour le Booster du PS, et Rende Steerenberg, chef du groupe Opérations (BE-OP) (Image: Maximilien Brice/CERN)


Le Linac 4, nouveau premier maillon de la chaîne, porte des ions hydrogène négatifs (des protons entourés de deux électrons) à une énergie de 160 MeV (contre 50 MeV auparavant avec les protons du Linac 2). L’énergie relevée et le nouveau système d’injection, convertissant les ions H- en protons, permettent d’augmenter la brillance d’un facteur deux. À dimension égale, le faisceau sera ainsi formé de deux fois plus de particules. Afin de conserver cette brillance dans le PS, l’accélérateur suivant, le Booster, augmentera l’énergie jusqu’à 2 GeV (contre 1,4 GeV auparavant), grâce à son tout nouveau système d’accélération. Les effets de répulsion électrique entre les particules de même charge (répulsion coulombienne) sont en effet d’autant moins grands que l’énergie augmente. Autrement dit, l’énergie concoure à maintenir les particules groupées et donc la brillance. Or qui dit plus de brillance, dit plus de luminosité. « Le Booster est une machine-clé pour augmenter la luminosité du LHC », explique Gian Piero Di Giovanni, responsable du projet LIU pour le Booster du PS. « La brillance du faisceau est en effet déterminée par cet accélérateur. » Le nouveau mode d’injection avec des ions H- et l’énergie plus élevée permettent par ailleurs de réduire considérablement les pertes de particules. « Nous n’aurons que 1 à 2% de perte à l’injection, contre plus de 30% avec l’ancien système », indique Gian Piero Di Giovanni.

Le chantier du Booster a duré 20 mois en surface et 18 mois en souterrain. Malgré l’ampleur des rénovations, les difficultés rencontrées notamment pour certains travaux de génie civil ou le système de refroidissement des cavités RF, et le confinement qui a gelé les activités pendant deux mois, le projet a été bouclé dans les temps. Un exploit que l’on doit à l’engagement des équipes et à une coordination minutieuse et réactive.

La mise en service des nouveaux systèmes a commencé depuis plusieurs semaines, localement. Les opérateurs prennent maintenant le contrôle avec de nouveaux logiciels de contrôle haut niveau. « Nous avons développé pendant deux années l’intégration de ces nouveaux systèmes », souligne Bettina Mikulec, qui supervise l’exploitation du Booster et du Linac 4. « Il faut maintenant mettre en service et tester tous les sous-systèmes depuis le Centre de contrôle et les faire fonctionner de concert. » Cette mise en service complexe durera plusieurs mois, d’abord sans particules. Tandis que le Linac 4 reprendra les tests avec faisceaux cet été, les premières particules devraient circuler dans le Booster du PS en toute fin d’année.

Les métamorphoses du Booster

  • Alimentation : Un nouveau système d’alimentation, similaire à celui qui avait été installé pour le PS (POPS), basé sur des convertisseurs de puissance et des condensateurs et dénommé POPS-B, a été installé en surface dans un nouveau bâtiment. Les convertisseurs de puissance alimenteront les aimants avec des intensités électriques de 5 500 ampères, contre 4 000 ampères auparavant. Depuis le premier long arrêt technique, plus de 95% des convertisseurs de puissance du Booster ont été changés. Quelque 318 nouveaux convertisseurs, allant de 1 kW à plusieurs MW, alimentent tous les équipements de l’accélérateur.
  • Refroidissement : Le Booster bénéficie d’un nouveau système de refroidissement avec des tours de refroidissement dans deux bâtiments rénovés.
  • Injection et éjection : Avec l’augmentation de l’énergie et l’utilisation d’ions hydrogène négatifs à l’injection, les lignes de transfert du Linac 4 vers le Booster et du Booster vers le PS ont été entièrement changées. Nouveaux aimants (à déflexion rapide, septa, dipôles, quadripôles et correcteurs), nouvelle instrumentation, nouveaux arrêts de faisceau. Du fait de ses quatre étages, le Booster requiert un système de distribution des particules particulièrement sophistiqué.
  • Accélération : Le nouveau système d’accélération est formé de trois structures abritant chacune huit cavités à base d’un matériau magnétique dénommé FineMet.
  • Aimants : Dans les lignes de transfert ou dans la boucle du Booster, une soixantaine d’aimants ont été remplacés ou rénovés.
  • Sécurité et instrumentation : Toute une batterie de nouveaux capteurs, moniteurs de positionnement de faisceau, moniteurs de perte de faisceau, scanners à fils, etc. ont été installés pour surveiller et mesurer les faisceaux de particules. Des équipements pour arrêter le faisceau ou les particules qui s’éloignent de la trajectoire rejoignent l’anneau. Parmi eux, un système de collimation (baptisé « absorber/scraper ») est le dernier équipement installé dans le Booster. Leur tâche est d’autant plus cruciale que le faisceau est plus dense.

Regardez le live Instagram réalisé dans le Booster du PS juste avant la fermeture de l’accélérateur.