Les améliorations réalisées pendant le second arrêt technique (LS2) permettront à l'expérience ALICE de fonctionner à des luminosités plus élevées qu'auparavant, et ce, dès la prochaine période d’exploitation du LHC. Une luminosité plus élevée signifie un nombre de collisions plus élevé au cœur du détecteur. Or, les collisions d'ions lourds, qui sont la spécialité de l'expérience ALICE, génèrent une plus grande variété de particules que les collisions de protons. Et certaines de ces particules s'échappent du détecteur et filent le long de la trajectoire du faisceau. Deux collimateurs supplémentaires doivent donc être installés de part et d’autre de l'expérience, un pour chaque faisceau sortant, afin d’éliminer les particules s'écartant de la trajectoire du faisceau avant qu'elles n'atteignent les aimants supraconducteurs. En effet, les particules frappant un aimant refroidi à 1,9 K (-271 °C) provoquent son échauffement, lui faisant ainsi perdre son état supraconducteur.
Pour héberger ces collimateurs, deux cryostats innovants ont été insérés entre les cryostats du LHC, de part et d’autre du point 2 du LHC, où se trouve l'expérience ALICE. Ces cryostats permettent d'insérer le long des lignes de faisceaux un collimateur qui doit fonctionner à température ambiante, tout en assurant la continuité de toutes les autres lignes du système des aimants : c'est pourquoi on les appelle des cryostats de dérivation (bypass cryostats). Cette amélioration est réalisée dans le cadre du projet LHC à haute luminosité (HL-LHC), dont les premiers composants ont été mis en place dans le tunnel du LHC lors de la première phase du LS2.
« Ces nouveaux cryostats de dérivation ont été conçus pour héberger un collimateur TCLD (Target Collimator Long Dispersion suppressor), tout en connectant les deux cryostats adjacents pour assurer la continuité du vide, les lignes cryogéniques et des câbles électriques supraconducteurs », explique Délio Ramos, ingénieur de projet pour les cryostats des aimants (département TE). Le même type de cryostat de dérivation sera utilisé pour installer deux collimateurs TCLD de part et d’autre du point 7 du LHC : dans ce cas, ils seront placés entre deux nouveaux aimants dipôles supraconducteurs de 11 teslas, qui sont parmi les équipements les plus innovants installés pour le HL-LHC pendant le LS2.
Au début de l'année, les deux cryostats de dérivation ont été installés et connectés, et le premier collimateur a été installé d'un côté d'ALICE ; le second prendra ses quartiers plus tard dans l'année. Ces collimateurs, qui ont été développés conjointement avec les nouveaux cryostats de dérivation, sont beaucoup plus compacts que les collimateurs standard. Malgré tout, une unité cryostat du LHC de 13 mètres de long, appelée cryostat de connexion (connection cryostat) car elle assure la continuité entre les aimants adjacents, a dû être remplacée par deux nouveaux cryostats de connexion d'une conception nouvelle. Ces nouveaux cryostats de connexion sont plus courts (environ 5 m de long chacun), de sorte qu'ils peuvent être placés, avec le cryostat de dérivation entre eux, dans l’espace de 13 mètres d'origine.
Comme tout cryostat de connexion, ces nouveaux cryostats courts assurent la continuité de l'alimentation électrique, du refroidissement et du vide dans le système des aimants, bien qu'eux-mêmes ne contiennent pas d'aimants. « Comme pour les cryostats de connexion précédents, les cryostats courts doivent aussi assurer le support et l’alignement des lignes de faisceaux avec une précision de positionnement de 0,5 mm sur toute la longueur du cryostat », explique Arnaud Vande Craen, ingénieur en charge des cryostats de connexion (département TE). « Nous avons dû développer une version courte de ces cryostats qui soit équipée d'une interface compatible avec le cryostat de dérivation. » Ces nouveaux cryostats de connexion courts ont été développés et fabriqués en trois ans.
Ce projet a été réalisé grâce à la collaboration entre différentes équipes du secteur Accélérateurs et technologie, regroupant les départements BE, EN et TE.