Placez une particule chargée dans un champ électromagnétique, elle sera accélérée et émettra un rayonnement. Le rayonnement émis n'a habituellement que peu d'effet sur le mouvement de la particule. Cependant, si l'accélération est très forte, comme celle que les électrons ou les positons de haute énergie subissent dans des champs électromagnétiques élevés, le rayonnement émis ralentira considérablement la particule. Cet effet, appelé « réaction au rayonnement », est connu depuis le début du XXe siècle et présente un intérêt dans plusieurs branches de la physique, de la physique des accélérateurs à l'astrophysique. Jusqu'à présent, néanmoins, il était difficile de fournir un modèle mathématique décrivant bien ce phénomène. Dans un article publié récemment dans Physical Review D, la collaboration NA63 rend compte d'une étude de haute précision portant sur la réaction au rayonnement, qui démontre qu'une équation formulée il y a de nombreuses années semble remarquablement pertinente.
Auparavant, l'équipe NA63 avait déjà étudié ce phénomène en envoyant un faisceau de positons de haute énergie du Supersynchrotron à protons (SPS) sur un cristal de silicium. D’autres études relatives à ce phénomène s’appuyaient sur la collision entre un faisceau laser de haute intensité et un faisceau d'électrons de haute énergie. Cependant, ces deux types d’études avaient été menées dans des conditions marquées par la prééminence des effets quantiques et, de plus, les expériences effectuées avec le laser s'appuyaient sur des échantillons de données relativement restreints présentant de grandes fluctuations dans les valeurs. Il était par conséquent difficile d'étudier très précisément le phénomène de réaction au rayonnement.
C'est là qu'intervient la dernière étude menée par NA63 : l’expérience a consisté à diriger un faisceau de particules chargées de haute énergie (des électrons ou des positons) du SPS sur plusieurs cristaux, de silicium ou de diamant, de différentes épaisseurs, en ciblant un cristal à la fois et en faisant varier l'angle selon lequel le faisceau frappe le cristal. Ainsi, l'équipe a réussi à étudier très précisément la réaction au rayonnement des particules chargées dans le champ électromagnétique puissant du cristal. À chaque fois, les scientifiques ont mesuré le spectre d'énergie des photons émis par les particules chargées, c'est-à-dire la variation du nombre de photons émis par les particules chargées en fonction de l'énergie des photons.
Ils ont conclu que tous les spectres d'énergie mesurés concordaient de façon remarquable avec les prédictions fondées sur l'équation de Landau-Lifshitz, qui décrit la dynamique des particules chargées dans un fort champ électromagnétique, à condition d’inclure dans les prédictions de légères variations dues aux effets quantiques.
« Cette équation classique a été formulée dans les années 1950 pour expliquer l’effet de la réaction au rayonnement, précise le porte-parole de NA63, Ulrik Uggerhøj. La nouvelle étude a exploré pour la première fois le régime expérimental où cet effet est dominant, et démontré que l'équation semble donner une bonne description d’un tel régime. »